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On lui dit souvent qu’il est né dans un pot de résine… C’est en 2023 que Thais Lefeuvre décide de reprendre l’entreprise familiale créée par sa mère, Magalye Berthomeau, il y a près de trente ans. Fort de ses expériences en tant que peintre en bâtiment et mécanicien au service de la société de Lamanage des ports de Marseille et de Fos-sur-Mer, il met son expertise au profit de son entreprise. ARP Concept est spécialisée dans la conception de bateaux sur-mesure pour le Lamanage, les pêcheurs professionnels et les activités de plaisance.

C’est une affaire familiale que vous gérez. Pouvez-vous nous retracer votre parcours professionnel ?

[Magalye Berthomeau]

Je me suis lancée dans ce secteur d’activité il y a un peu plus de trois décennies, quand j’ai rencontré mon ancien mari, passionné de bateaux. Dans les années 1980, il construisait des bateaux de course et, en parallèle, il fabriquait son propre dériveur intégral en acier. Ensuite, nous avons construit un catamaran de dix mètres, puis, quelques années plus tard, nous avons créé notre chantier à La Rochelle où nous avons construit un second catamaran de quinze mètres. A cette époque, il existait très peu de bateaux de cette taille.

Après cette première expérience dans l’entrepreneuriat, nous avons décidé de déménager à Port-Saint-Louis-du-Rhône, au Port Napoléon, car nous avions l’opportunité de disposer d’un hangar au bord de l’eau nous permettant de construire de grands projets. Nous avons ainsi pu terminer un catamaran de vingt-cinq mètres de long.

Après mon divorce, j’ai continué cette activité seule et j’ai assuré des chantiers de grandes ampleurs. C’est un secteur d’activité assez masculin. Certaines femmes, installées en Vendée ou en Charente Maritime, dirigent des équipes mais je suis fière de dire que je suis la seule femme en Europe à travailler seule.

Maintenant, Thais m’a rejoint dans cette affaire familiale car j’ai pour projet de partir à la retraite d’ici un an et demi. Je découvre les avantages de travailler à deux : avoir un regard extérieur quand on a la tête dans le guidon, prendre du recul et échanger afin d’améliorer nos bonnes pratiques.

Vous travaillez tous les deux en binôme et Thais apporte à votre entreprise un nouveau souffle. Pouvez-vous nous en dire plus ?

[Thais Lefeuvre]

On me dit souvent que je suis né dans un pot de résine ! En effet, j’ai grandi dans l’univers du chantier naval mais j’ai toujours dit à mes parents que je ne construirai jamais de bateaux et que je ne ferai jamais de mécanique. Finalement, j’ai fait les deux…

Après avoir obtenu un titre professionnel de peintre en bâtiment, j’ai travaillé pendant plus de quinze ans dans ce secteur d’activité. Puis, en 2016, j’ai intégré la société coopérative du Lamanage des Ports de Marseille et de Fos-sur-Mer en tant que mécanicien. J’avais pour mission de réaliser l’entretien et la réparation des bateaux.  

Ces deux expériences sont de réelles plus-values pour notre entreprise familiale. Initialement, ma mère ne proposait pas d’accastillage. Un fois que la coque en polyester était créée, le client se chargeait de réaliser les finitions du bateau. A présent, je peux m’atteler à de la peinture, de la mécanique et de l’électricité. Nous commercialiserons des bateaux aux finitions plus poussées.

Vous parlez de vos clients. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Il faut savoir que ce secteur d’activité est un microcosme. Nous avons une certaine notoriété en Méditerranée et nos clients peuvent venir de Corse et même de Sardaigne.

Notre carnet de commandes est bien rempli sur cette année et 2024 où nous allons commencer la construction d’un nouveau Lamaneur.

Si nous devions détailler notre clientèle, nous avons trois types de profils : la société coopérative du Lamanage des Ports de Marseille et de Fos-sur-Mer pour laquelle nous avons une forte appétence car nous connaissons ces bateaux sur le bout des doigts. Puis, nous avons des pêcheurs professionnels et des plaisanciers.

Vous construisez des bateaux de sept mètres, voire plus. Pouvez-vous nous détailler les types de bateaux que vous fabriquez ?

Nous construisons et nous assurons les réparations des bateaux du Lamanage qui permettent d’amarrer les cargos ou les paquebots aux ports de Marseille et de Fos-sur-Mer. Ce sont des bateaux qui reçoivent beaucoup de chocs au vu de leur utilité et des risques de leurs missions. Ma mère a construit seize bateaux en dix-huit ans, déclinés en deux modèles de huit mètres et de dix mètres. Comme nous avons le moule initial de la coque, nous pouvons tout réparer sans aucune contrainte.

Pour les pêcheurs professionnels, nous fabriquons des modèles de sept mètres à la commande. Et nous pouvons réaliser de gros travaux d’entretien. Par exemple, des bateaux que l’on doit remettre aux normes, des bateaux à raccourcir ou à rallonger, ou bien encore de vieux bateaux qu’il faut remettre à neuf.   

Enfin, pour les particuliers, nous pouvons fabriquer des petits bateaux à partir de six mètres à la commande. Dans le cadre de la plaisance, il n’y a pas de limite et de norme dans le type de construction. C’est au bon vouloir du client mais nous sommes là pour l’orienter et le conseiller. Un petit bateau de plaisance avec un accastillage complet peut être vendu à partir de 38 000 euros. Le prix évolue bien sûr selon les types de finitions demandés.

Il y a quelques années, ma mère a aussi conçu les barques des joutes de l’Estaque à partir de moules en bois. Maintenant, nous ne les fabriquons plus mais nous assurons l’entretien des bateaux de joutes du club de Port-Saint-Louis-du-Rhône. 

Votre coeur de métier est la fabrication de la coque en polyester. Pouvez-vous nous en dire plus sur les différentes étapes de fabrication ?

La fabrication du moule est l’élément fondamental de notre travail. Si le moule est réussi la coque le sera aussi. A l’inverse si le moule a des défauts, la coque en aura également. Nous proposons trois types de moules, soit trois types de bateaux cités précédemment.

La coque est fabriquée en deux parties à partir d’une superposition de couches de gel coat, résine et de tissus. Il faut en moyenne sept couches de tissus comprenant du tissu structurel (de type carbone, roving ou fibre de verre) et du tissu de finition permettant d’arriver à un centimètre d’épaisseur pour réaliser la coque d’un bateau. Ce type de construction, en deux parties, permet de dégazer l’osmose du bateau.

Il faut compter environ une semaine pour réaliser la coque brute d’un bateau. Viennent ensuite les étapes de peinture, mécanique et accastillage si nécessaire. Mais, pour des projets de rénovation, le travail est plus long car c’est en démantelant le bateau, que nous découvrons, la plupart du temps, l’ampleur des travaux qui seront à réaliser.

Nous sommes les seuls constructeurs de coque à Port-Saint-Louis-du-Rhône. Et nos tarifs sont assez compétitifs. Nous fixons nos prix au forfait, c’est-à-dire à la semaine où au mois.

ARP Concept
Port Navy Service, 13230 Port-Saint-Louis-du-Rhône
06.95.05.82.46