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Ancien militaire de la base aérienne d’Istres, Nicolas Sanchez décide de changer de vie en se lançant dans l’aventure de l’entrepreneuriat accompagné par Initiative Ouest Provence. En ouvrant sa librairie, ce passionné de 9ème art, propose un nouveau concept sur plus de 130 m² : faire découvrir au plus grand nombre l’univers des bandes dessinées, mangas, comics en proposant plus de 15 000 livres neufs ou d’occasion.

Vous êtes un véritable passionné de livres. Dites-nous en plus ?

En effet, j’ai toujours été passionné par les livres. Très jeune, je dévorais les bandes dessinées « Tintin » et « Astérix ». De 14 à 17 ans, j’ai eu des problèmes de santé. J’étais en fauteuil roulant puis je me déplaçais avec des béquilles au plus mauvais âge quand tous mes amis étaient des adeptes de foot et autres sports. Malheureusement, je ne pouvais pas les suivre dans toutes leurs activités.

Alors, le livre m’a accompagné et est devenu mon ami, d’une certaine manière. J’ai beaucoup lu, principalement des bandes dessinées et c’est à partir de là que je suis devenu passionné du 9ème art. Alors, très rapidement, travailler dans ce domaine est devenu mon objectif.

Et pourtant, vous avez choisi la voie de l’armée. Pourquoi ?

J’avais le projet d’être mon propre patron et d’ouvrir mon commerce depuis toujours mais je ne pouvais pas le réaliser à 20 ans car je n’avais pas l’expérience et les moyens financiers pour le faire. Je n’envisageais pas de travailler en tant qu’employé dans un magasin ou dans une bibliothèque, ce n’est pas ce qui me faisait vibrer.

Parallèlement, j’ai toujours aimé les avions alors je me suis dit que je pourrais rentrer à l’armée. J’ai fait 23 ans de carrière en tant que militaire à Metz, Evreux, Rochefort… Puis à Istres où j’étais chef de bureau technique à la base aérienne. Je suis originaire d’ici, c’était un plaisir pour moi de revenir vivre dans ma région natale.

Pendant toutes ces années, j’ai fait murir mon projet et j’ai beaucoup réseauté. J’ai pris contact avec des artistes et j’ai créé le festival Aero BD en 2015, un concept qui lie mes deux passions pour l’aviation et la bande dessinée. Grâce à cet évènement, j’ai étoffé mon carnet d’adresse et j’ai eu l’occasion de collaborer avec les librairies de la ville d’Istres notamment « Le Marque Page ».

A quel moment avez-vous envisagé votre reconversion professionnelle ?

C’est au moment où j’ai eu l’opportunité d’acheter ce local. Les dirigeants de la librairie « Le Marque Page » étaient devenus mes amis. Quand ils ont décidé de vendre les murs ils sont venus vers moi afin de savoir si ça pouvait intéresser quelqu’un de mon entourage. J’ai tout de suite sauté sur l’occasion.

J’ai toujours fait des investissements immobiliers et je savais que le local avait du potentiel et était bien placé dans le centre-ville d’Istres. Il fallait encore que je façonne mon concept mais la superficie de 130m² pouvait laisser place à beaucoup de projets.

C’était il y a 5 ans, et c’est à ce moment-là que je me suis projeté, plus concrètement, dans une nouvelle activité professionnelle. Entre l’achat des murs et l’ouverture du commerce, il y a eu une période de latence liée au Covid et à ma réflexion personnelle sur ce que je voulais faire exactement de ce local et le concept de la librairie.

Vous avez fait murir votre projet longtemps. Quel est donc votre concept ?

Initialement, j’envisageais de proposer un espace livres d’occasion et une galerie d’art. Dans cette optique, j’ai accumulé beaucoup de bons livres pendant des années : des mangas, bandes dessinées, comics, etc. Pour la partie galerie d’art, mon carnet d’adresse était déjà bien fourni. Certains artistes sont même devenus de très bons amis.

Mais j’avais une inquiétude : il fallait que j’achalande le magasin afin que chaque personne qui rentre y trouve son bonheur. Et finalement, il était indispensable que je propose un espace de livres neufs dans mon concept. J’ai donc acheté un stock de 10 000 livres pour pouvoir répondre à toutes les demandes. La véritable prise de risque est là car il faut que je sois au plus proche de mon prévisionnel en février 2023 au moment où je devrais payer mes fournisseurs.

Ma deuxième crainte était que les travaux réalisés ne soient pas suffisants pour que la boutique plaise au plus grand nombre. J’ai effectué des travaux pendant plus de 8 mois pour que celle-ci soit à mon image. Je me suis investi pleinement jusqu’à chiner des meubles métiers et les restaurer personnellement.

Sans prétention, je pense que j’ai relevé ces deux défis : j’ai de la chance que tout le monde trouve la boutique belle et que plus de 90% des clients repartent avec les livres qu’ils recherchent, même les plus rares.

Comment est structuré votre commerce ?

Finalement, il est structuré en trois espaces. A l’entrée du magasin, je propose des livres neufs : principalement des bandes dessinées pour adultes et jeunes publics. 70% de mes ventes sont les mangas. Les lecteurs les consomment très vite et avec les dessins animés diffusés à la télévision ou sur des plateformes comme Netflix, les jeunes en sont encore plus adeptes. Par exemple, pour la série Naruto, il y a 72 volumes et plus de 1 000 épisodes ! La plupart des enfants en ce moment se mettent à la lecture par le manga.

Dans la continuité de l’univers des livres neufs, je propose un espace dédié à la galerie d’art où j’organise des expositions éphémères (qui durent entre 6 et 8 semaines) liées à des sorties d’albums afin de coller au mieux à l’actualité. Chaque exposition est inaugurée en présence de l’artiste qui signe des dédicaces. En ce moment, j’expose les planches originales de Simon Van Liemt, le dessinateur des « Nouvelles enquêtes de Ric Hochet » dont l’album est sorti fin septembre. Acheter une telle oeuvre, c’est à la fois se faire plaisir avec un objet original, une oeuvre d’art et réaliser un investissement car selon certains auteurs les planches peuvent prendre beaucoup de valeur !

Un troisième espace vient compléter mon offre. Je l’ai appelé les « BD épuisées » et il est entièrement dédié aux livres d’occasion que j’accumule depuis de nombreuses années maintenant. J’ai un stock de plus de 5 000 références de seconde main me permettant de répondre à toutes les demandes des clients.

Enfin, je propose un coin café. Pour 2 euros, les clients peuvent prendre un thé ou un café et s’installer confortablement dans un fauteuil ou dans le petit patio pour lire un livre.

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Quels sont vos projets d’avenir ?

Je consacre 90% de mon temps à la librairie afin de la rendre autonome et me dégager du chiffre d’affaires pour faire tourner la boutique. Mon premier objectif est donc de me dégager du temps pour retravailler mon site de vente en ligne dédié à la galerie d’art. Je veux optimiser celui-ci afin qu’il soit plus performant. Pour la vente en ligne des livres, je n’ai pas cette problématique car je suis très bien référencé sur le site Canal BD.

Mon autre projet est de proposer des ateliers de dessin manga sur le premier trimestre 2023. Quand la période des fêtes sera passée, je pourrai réfléchir à cette idée. J’envisage de proposer ce type d’atelier une fois par semaine, le mercredi.

Enfin, j’ai été sollicité par le salon « Eternellement Manga » organisé à Istres. J’aimerais collaborer avec eux sur les saisons à venir en leur offrant mes services de mise en réseau avec différents artistes que je pourrais faire venir lors de l’évènement. J’ai en tête quelques auteurs de manga comme Reno Lemaire par exemple.

Comment avez-vous financé votre projet ?

Après avoir obtenu 2 mois de reconversion professionnelle, j’ai quitté mon poste en janvier 2022. A ce moment-là, j’ai pris ma retraite de l’armée et obtenu une pension. Je prenais moins de risque financièrement que si je m’étais lancé dans ce projet à 20 ans.

Avec Initiative Ouest Provence, j’ai pu obtenir un prêt d’honneur « création » de 7 000 €. Cependant, les démarches pour obtenir des financements auprès des banques ne sont pas faciles. Il faut croire en son projet, être persuasif et ne rien lâcher !

Pour finir, quel est votre livre coup de coeur ?

« Le singe de Hartlepool » dessiné par Jérémie Moreau et scénarisé par Wilfrid Lupano. C’est une bande dessinée qui traite de la peur de l’autre et plus largement du racisme. L’histoire se passe au début du 19ème siècle, au large des côtes anglaises, vers le petit village de Hartlepool. Un bateau fait naufrage lors d'une tempête. Il n’y a qu’un seul survivant : un singe qui servait de mascotte au capitaine du navire, et qui porte l'uniforme français. Or, les habitants de ce village détestent les Français et décident de juger le singe qui n’a rien fait. Je vous laisse découvrir la suite !

Librairie Galerie BD Nicolas Sanchez
22 avenue Hélène Boucher – 13800 Istres
06 50 42 81 22
Ouvert du mardi au samedi de 10h00 à 13h00 et de 14h00 à 19h00

www.galerie-nicolas-sanchez.fr

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Crédit photo : Ludivine Rambaud